On connaissait lulu.com, site d’auto-édition et d’impression à la demande, voici pour lulu un concurrent sérieux, CreateSpace. Pourquoi sérieux ? Parce que CreateSpace (ancien nom : CustomFlix) appartient depuis 2005 à Amazon. Sur CreateSpace on peut faire fabriquer livres, CD, DVD, livres audio, disposer des vidéos à la demande, mais également les diffuser, via Amazon, CreateSpace, ou sur sa propre librairie en ligne. Les livres créés sur CreateSpace pourront en outre bénéficier de la fonction « Amazon’s Search Inside! ».
L’auto-édition n’est pas quelque chose de nouveau, mais tend avec ces sites à changer complètement d’image et probablement de rôle. Pour beaucoup, l’auto-édition (ou « édition à compte d’auteur ») avait une image très négative : la possibilité pour les « refusés » de l’édition de serrer un jour contre leur coeur l’objet de tous leurs fantasmes : leur livre, et de le tirer à quelques dizaines d’exemplaires pour l’offrir à leur entourage. C’était aussi la possibilité de publier la biographie sans grand intérêt et pas très bien rédigée de votre vieux tonton monomaniaque pour l’offrir à votre tante reconnaissante.
Mais attention, aujourd’hui, on ne dit plus auto-édition on dit print on demand. Les Mac sont vendus avec une suite logicielle qui s’appelle iLife. Et les utilisateurs « génèrent du contenu » ; ils abreuvent YouTube de vidéos, FlickR de photos, et leurs blogs de posts sur l’auto-édition…
L’éditeur, lorsqu’il s’agit de livres, manque de différentes manières à cette forme d’édition : il y manque un tiers, un interlocuteur, un intermédiaire, un quelqu’un à qui parler, à qui montrer, avec qui travailler, avec qui s’entretenir du devenir du livre. Il manque ce début d’aventure, sortir le livre du tiroir, le faire lire à quelqu’un. Au lieu de cela : remplir un formulaire, nom, prénom, eMail, nombre de pages, format, qualité de couverture, upload d’un PDF, carte bleue… Et quelques jours plus tard, le carton qui arrive, avec les exemplaires.
Je décris ici une vision naïve de l’édition, qui fait l’impasse sur plusieurs métiers abrités dans une maison d’édition, et qui vont du texte à l’objet livre, en en réglant avec précision tous les aspects, et qui l’assimile complètement à l’édition de littérature générale. Comme en ce qui concerne les eBooks, il n’est pas du tout certain en effet que les Å“uvres de fiction soient concernées en priorité par ces services. Le print on demand prend déjà la place de la photocopieuse associée à la reliure artisanale (petits boudins en plastique et trous trous) pour un certain nombre de travaux : des rapports, des thèses, des albums souvenirs, des « books » de graphistes, de comédiens ou de photographes. On imagine qu’il serait plaisant par exemple de publier le roman collectif écrit par une classe de cinquième sous la forme d’un « vrai livre ». Déjà , les sites offrant la possibilité de mettre en page ses photos accompagnées de texte avant d’en commander une ou plusieurs versions imprimées se sont banalisés. Certains proposent des outils de mise en page téléchargeables (blurb.com), d’autres proposent le service en ligne (tabblo.com). Tous offrent des possibilités qui dépassent le simple album photo, et se rapprochent du « beau livre ».
La nouveauté, c’est aussi de présenter la fabrication à la demande de livres à égalité avec du CD audio et du DVD : une illustration de ce que l’on nommait « convergence » au début du siècle. Textes, images fixes, images animées, sons, se retrouvent sous le même régime, celui du numérique.
Un régime qui risque fort de secouer les habitudes des éditeurs… Non ?
(via Read/Write Web)
Bonsoir Virginie
Excellent papier, bravo, je savais pas que Amazon avançait sur le print on demand sur ce site. Amazon est absolument partout. Dans la presse aussi, magazines, journaux, mon ami Olivier, journaliste aux Echos m’en parlait récemment. En revanche, contrairement à Lulu, il n’y a pas de vitrine spécifique, j’en conclus donc que tout part directement sur Amazon… je vais fouiller tous ces sites, merci
« Un régime qui risque fort de secouer les habitudes des éditeurs… Non ? »
Alors, en fait non.
Plutôt des éditions à compte d’auteur qui valoriseront d’autant plus leur rôle de tiers dans l’élaboration du livre… Les éditeurs ont déjà leur version du print on demand, l’édition numérique pour relancer des petites quantités de texte sur lesquels il serait suceptibles de perdre leur droit.