Et si on mettait un livre…

On « met un disque », c’est un geste bref, qui précède l’écoute. On ne « met » pas un livre. Tout le temps qu’on lit, on est en compagnie du livre. On est en contact avec lui. On le touche. On le regarde. On le manipule. (La photo illustrant l’affiche du Salon du Livre joue sur ce décalage, sur la confusion des sens, en montrant un personnage serrant des livres contre ses oreilles, et semblant tirer un  intense plaisir de cette expérience…)
Que mon casque soit branché sur un Walkman ou sur un iPod, que j’écoute un opéra en insérant un CD dans le lecteur ou bien en branchant mon iPod sur ma chaîne, l’expérience musicale n’est pas radicalement différente. Mais nous savons tous que lire sur un écran ou sur du papier ne produit pas la même impression, et que lire sur un iLiad ou un Reader Sony ne sera pas une expérience exactement identique à celle de la lecture d’un livre traditionnel.

C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles la dématérialisation de la chaîne du livre ne s’opère pas à la même vitesse que celle du disque, même si elle semble s’accélérer fortement cette année, après son faux départ de 2001. Six ans plus tard, les technologies ont évolué, et il semble que sonnera bientôt la fin de l’heure des expérimentations : voir l’interview de Lorenzo Soccavo, auteur de « Gutenberg 2.0 » dans le BillautShow. (trouvé via Affordance).Ce qui me fait aimer la lecture sur écran, c’est la proximité que l’ordinateur permet entre lecture et écriture, et, avec internet, entre lecture, écriture et publication, au sens de la mise à disposition et de l’échange possible.
Je ne sais pas ce qui pourrait me faire aimer la lecture sur iBook, faute de l’avoir expérimentée.

En attendant de le faire, je m’interroge : pourrai-je prêter mes livres électroniques, comme j’aime tant le faire de mes livres papier ? À quelqu’un qui dispose du même modèle que moi, probablement. Mais quid des autres, qui disposeront d’un modèle différent, et des (pauvres) autres qui n’auront même pas d’iLiad ?
Et si les ordinateurs portables deviennent toujours plus petits et légers et bon marché, tout comme les téléphones plus performants, pourquoi m’embêter avec un objet qui ne me permettra que de lire ?
Probablement ces questions figurent-elles déjà dans les FAQ de tous ceux qui promeuvent aujourd’hui le livre électronique, et qu’elles seront vite balayées. Très vite, un équivalent pour le livre du lecteur mp3 pour le disque peut se généraliser. Il sera temps alors de s’interroger sur la pertinence des DRM, la tarification, les modèles économiques basés sur l’acquisition et ceux basés sur l’accès, l’interopérabilité des lecteurs…

Et vous, avez-vous utilisé déjà l’iLiad ou le Reader ? Ça vous a plu ?

Publié dans édition, édition électronique, la vie numérique | 5 commentaires

Jeffrey Yamaguchi, Michael Crichton, et NEXTgencode…

Voici ce que Jeffrey Yamaguchi, on-line marketing manager chez Harper Collins, se donnerait comme conseil s’il pouvait parler au jeune débutant qu’il a été un jour (lu sur Book business) :

« Take chances, be creative, have fun with it, work hard, look for and try new ways of doing things. All those things sort of go hand-in-hand. It’s easy to say or give that advice and much harder to actually pull-off consistently, but I think the best work comes through when all those elements are in play. Oh … and learn how to sell. No matter what you are doing, you have to sell it. »

You have to sell it, man…

Et voici comment Jeffrey Yamaguchi, qui a bien écouté ses propres conseils,  vend « Next »,  le dernier livre de Michael Crichton :
il a créé tout spécialement un site internet sur lequel on peut visualiser des vidéos promotionnelles vantant les produits d’une firme spécialisée dans les manipulations génétiques. NEXTgencode, c’est le nom de cette société fictive, peut vous fabriquer un chien qui restera éternellement jeune, des enfants dont vous choisirez le sexe, la couleur des yeux, la taille, le poids, les talents… Les vidéos qui s’affichent sur le site sont également diffusées sur la home page d’Harper Collins, sur YouTube, sur les sites de librairie en ligne, et dans certains programmes télévisés matinaux. C’est provocateur, assez drôle, grinçant et dérangeant, soigneusement réalisé.

Est-on allé aussi loin pour le site de lancement d’un ouvrage, ici dans l’hexagone ? Si oui, je veux bien cliquer sur quelques liens.
Et aussi, « on-line marketing manager », ça existe, dans les maisons d’éditions françaises ? Vous en connaissez ?

Publié dans édition, la vie numérique, Uncategorized | 5 commentaires

Qu’est-ce qu’un Zapp ?

Un zapp, ça se présente comme ça :

sur le site Gotzapp.
Pour fabriquez un Zapp, nous apprend Fred Cavazza, qui le tient du site Mashable,

  1. vous compilez un ensemble de contenus (texte, photos, animations, audio…) dans un petit paquet (ils appellent ça des Zapp) ;
  2. vous le publiez sur le site ;
  3. les utilisateurs peuvent le télécharger sur leur terminal mobile et le consulter à loisir.

Il y a également une dimension sociale très intéressante à ce service :

  • chaque contributeur dispose de sa fiche et de son évaluation ;
  • les Zapp sont notés et classés selon un système de taggs ;
  • vous pouvez recommander un Zapp en envoyant un SMS à un ami.

Imaginons un « educ’ Zapp », un « memo Zapp », un « reviz’ Zapp » soit :
– Une liste de vocabulaire, sa prononciation, des images qui aident à mémoriser
– Les deux théorèmes et les 4 définitions qui vont tomber à coup sûr demain en contrôle de maths
– Les deux dernières strophes de ce poème d’Hugo, que la prof de Français s’acharne à vouloir nous faire apprendre par coeur
Et puis le prof de physique qui s’est mis en tête de nous faire fabriquer nous-même des Zapp. On a dû drôlement bosser la leçon pour réussir à choisir ce qu’on mettrait dans le Zapp. On a même fait des photos de notre manip en TP ! Ça donne drôlement bien, même en tout petit sur l’écran de mon portable…

Alors, Zapp ou pas Zapp ?

Publié dans édition électronique, la vie numérique, learning object, Uncategorized, widget | Laisser un commentaire

chez l’éditeur O’Reilly, le service Rough Cuts

Un commentaire vient d’être ajouté à l’un de mes précédents billets, sur le thème du devenir du « brouillon », à l’ère du traitement de texte.
Qu’est-ce qu’un brouillon ?
Est-ce qu’il se définit par son aspect ?
– mauvais papier un peu jaune des cahiers de brouillon de l’écolier versus beau papier lisse des cahiers de cours ou d’exercices
– ratures, surcharges, nombreuses traces d’hésitations, de repentirs, mélanges de textes et de croquis
Est-ce qu’il se définit par son statut ?
Toutes les versions d’un texte tant qu’il n’est pas publié, et cela incluerait alors le manuscrit corrigé, les premières épreuves etc.
Toutes les versions d’un texte tant que son seul lecteur est son auteur lui-même ?
La traduction littérale du mot « rough » est « rugueux » : un texte rugueux, l’image est belle, très matérielle, d’un texte qui n’aurait pas encore été poli, pas encore suffisament travaillé pour briller…
Ce service proposé par les éditions O’Reilly, d’un accès à des livres encore en train de s’écrire, s’applique fort bien au secteur des livres informatiques, où les innovations se succèdent à très grande vitesse, et où il peut être stratégique d’accéder « avant tout le monde » à de l’information sur une technologie, « to stay ahead of the curve ».
Il est aussi emblématique d’un état d’esprit particulier : j’écris pour des lecteurs, j’écris « devant » mes lecteurs, je pense devant eux, je pense avec eux, je n’ai pas peur d’être copié, j’écris avec eux, je n’ai pas peur de leurs remarques, leurs remarques m’intéressent, il n’est pas pertinent pour moi, l’auteur, de faire la démonstration d’une quelconque supériorité. Je ne suis pas drapé dans une merveilleuse solitude.
Encore une fois, cela s’applique bien à des livres d’informatique. A votre avis, à quels autres types de livres cela peut-il s’appliquer également ?
Publié dans édition, la vie numérique | 6 commentaires

Me.dium , ou le co-websurfing

Me.dium est une extension Firefox (ou IE) qui ouvre une fenêtre dans votre navigateur, et :

– permet de voir quels sites visitent actuellement les autres abonnés à Medium partageant vos centres d’intérêt, quels sites visitent actuellement ceux de vos amis qui sont abonnés
– permet à vos amis (abonnés) et aux abonnés partageant vos centres d’intérêt de savoir quels sites vous visitez actuellement

et permet à tout ce monde de rentrer en contact via une fenêtre de chat.

Les autres sont représentés par l’icône du site qu’ils sont en train de visiter, flottant dans une sorte de nuage, le clic sur une de ces icônes emmenant vers le site en question.

Cela transparaissait déjà dans mes précédents billets, je suis d’humeur gadget, ces jours-ci. Enfin, quelque chose me dit que les usages de me.dium pourraient aller au-delà du simple « coucou, trop drôle, toi aussi t’es sur le site de la starAc ? »

Avant c’était « My » (my Yahoo, MySpace), puis on a eu You (YouTube) maintenant c’est carrément « Me » (me.dium).
«  the medium is the message », disait Mac Luhan. Que penserait-il de me.dium ?
Et aussi : notre narcissime pourra-t-il résister ?

Publié dans la vie numérique | Laisser un commentaire

Ce widget est-il un gadget ?

J’aime bien le mot gadget, c’est un mot gai, un mot qui ne se prend pas au sérieux. Alors j’aime bien aussi widget, qui lui ressemble. Comme le gadget le widget est un objet dont on pourrait très bien se passer, comme lui il a cependant quelque chose d’irrésistiblement attirant…

Je suis sûre que le « widget book » dont on peut voir ici deux exemples, (sur le site d’If:book, via La Feuille) l’un produit par Random House et l’autre par Harper Collins attirera irrésistiblement ceux qui ont déjà craqué récemment pour les tournepage et autres feuilleteurs, avec simulation de la page qui se tourne. Comme s’il était nécessaire de convoquer, encore et encore, le livre dans sa dimension d’objet, avec son aspect, son poids, sa forme, pour que l’écran se fasse livre, comme l’automobile, dans ses premières années, se faisait carosse… (ou citrouille ? Non, là, je confonds…)

J’aime les livres, mais je les aime en vrai, j’aime les manipuler, tourner leurs pages, j’aime leur odeur, leur texture. J’aime aussi les écrans, leurs reflets, les apparitions /disparitions qu’ils permettent, le miracle toujours renouvelé des liens, les petits bonheurs d’interfaces astucieuses, les virtuosités de certains flasheurs, la rigueur limite Bauhaus des designers CSS, l’intelligence des développeurs qui fuse et se diffuse. Mais tourner en ligne les pages d’un livre… Pour quoi faire ?

Publié dans hors ligne, la vie numérique, widget | 7 commentaires

par dessus l’épaule – 2

Fernand indique en commentaire du billet précédent un lien vers des photos et plans d’une classe équipée en ordinateurs et vidéoprojecteur dans le cadre de l’expérimentation d’un cartable électronique développé par l’Université de Savoie (Chambéry, Annecy).
Entre l’aménagement de la salle 309 et de la salle 208, il y a une belle amélioration…
J’aperçois un vidéoprojecteur : on a là un espace avec des postes en « L », qui permet plusieurs types de mobilisation des élèves, individuelle ou collective.
Fernand propose l’idée de lancer un recensement, toujours à propos des dispositifs spatiaux et des pratiques pédagogiques qui vont avec. Mais je crains que mon blog tout récent ne manque de visibilité pour obtenir des réponses en grand nombre, réponses que je n’aurais d’ailleurs pas les moyens de traiter… Restons donc dans le cadre de la conversation, qui demeure l’objectif de ce blog.
L’INRP fait régulièrement des enquêtes en ligne, j’en ai trouvée une aujourd’hui destinée à recueillir les témoignages des profs de SVT et d’histoire-géo.

Bien sûr, vos liens vers des photos, des plans, ou des témoignages directs sur les dispositifs sont les bienvenus, tous comme vos réflexions à ce sujet…

J’ai consulté aussi une liste de diffusion (mmm, l’ergonomie si délicate rustique de ces listes vous a un petit goût « pionnier » que j’adore) à propos de l’usage des TBI à l »Ã©cole primaire, on y trouve surtout une sorte de bourse d’échanges de contenus destinés aux TBI, réalisés par les enseignants eux-mêmes.

Publié dans ENT, la vie numérique, TBI | Laisser un commentaire

par dessus l’épaule

Il y a quelques années, dans le petit monde des NTICE (prononcer Hennetisse, si vous aimez la tradition, ou bien N’Tis, si vous préférez un peu d’exotisme), il était assez souvent question d’enseignement « par dessus l’épaule ». Il ne s’agissait pas d’une méthode d’éducation nouvelle inspiré de « Libres enfants de Summerhill« , ni d’une sorte d’éducation désinvolte, à base de cours dispensés « par dessus la jambe ». Non. Ce vocable désignait l’organisation spatiale de la classe, et la position des uns et des autres à l’intérieur de celle-ci, dès lors que chaque élève était équipé d’un ordinateur. L’enseignement « par dessus l’épaule » illustrait la position de l’enseignant, derrière l’épaule de l’élève face à son ordinateur, derrière l’élève actif, derrière l’élève acteur, présent auprès de lui, l’accompagnant dans l’acquisition des connaissances. Il s’opposait au cours magistral, le professeur face à sa classe, tous les regards des élèves (théoriquement) braqués sur lui, le professeur acteur, le professeur actif, et les élèves attentifs.
L’engouement actuel pour le tableau blanc interactif n’est-il pas une manière de prolonger, voire d’amplifier le cours magistral, et d’essayer de mettre définitivement hors service ce concept d' »enseignement par dessus l’épaule », qui vient redéfinir la relation professeur – élève ?
L’usage du tableau blanc modifie la place de l’enseignant dans la classe. L’enseignant est parmi ses élèves, ensemble ils regardent le TBI, avec lequel l’enseignant peut interagir. Le TBI prefectionne le cours magistral, permet en quelque sorte un « cours magistral augmenté ». Tout dépend bien sûr de ce qui est présenté sur ce TBI, de la manière de l’utiliser, mais le disposiitif n’est certainement pas neutre.
Il existe déjà dans les classes non équipées d’ordinateurs des moments « d’enseignement par dessus l’épaule » , lorsque par exemple l’enseignant passe de table en table pour observer « par dessus leur épaule » les élèves en train de faire un exercice. Ces moments, ou l’élève se recentre, baisse les yeux sur sa feuille, se coupe du monde extérieur pour se concentrer, correspondent à l’un des moments où l’enseignement s’individualise, par opposition aux moments collectifs du cours magistral et des phases de questions / réponses.

Il serait intéressant de recenser les dispositifs physiques d’enseignement, leur disposition spatiale, de façon plus systématique, et de les mettre en relation avec les dispositifs pédagogiques, et de réfléchir aux dispositifs incluant les nouvelles technologies de la même manière, (Où et comment sont disposés les ordinateurs ? Combien d’élèves par ordinateur ? Est-ce que ce sont des portables ou des ordinateurs de bureau ? Utilise-t-on un vidéoprojecteur ? Un TBI ?)

Mais peut-être est-ce que cela a déjà été fait ? Si oui, je suis preneuse de toute référence.

Publié dans édition électronique, la vie numérique, TBI | Un commentaire

carambolage de blogs

Bien ri ce matin en trouvant le commentaire de Clément (précédent billet), puis son billet sur son blog, sur lequel, bien sûr, je laisse un commentaire à mon tour.

Publié dans la vie numérique | Un commentaire

livre et cinéma

Découvert grâce au blog de Clément Laberge, ce site qui présente une collection de flipbooks, dont l’auteur indique qu’il s’agit d’une forme d’art « Ã  mi chemin entre le livre et le cinéma. »
Effectivement, le feuilletage rapide des pages de ces mini-livres permet de construire une animation, grâce aux images qui figurent sur chacune de ces pages. C’est peut-être anecdotique, mais plutôt rafraîchissant aussi… J’entendais sur France Culture ce matin Bruno Latour parler « non pas de bibliothèque, mais de plate-forme multimodale ». C’est une expression qui fait peur, car elle conjugue la complexité de deux termes : plate-forme, qui fait penser à plate-forme pétrolière, univers ultra technique peuplé d’ingénieurs casqués, et multi-modale, où « multi » nous dit qu’il y en a plusieurs, et « modal » , à lui tout seul, évoque la complexité, alors imaginez, « multimodal » !

Un tour sur Wikipedia m’apprend que Latour emprunte ce terme à l’univers de la logistique :

« Dans le domaine du transport de marchandises, la plate-forme multimodale désigne le lieu où les marchandises changent de mode de transport. Dans le transport de voyageurs l’équivalent est le pôle d’échanges. Une plate-forme multimodale doit assurer dans les meilleures conditions le transport intermodal et le transport combiné des marchandises. »

Pourquoi choisir cette expression alors ? Pour nous enseigner que le contenu des livres (marchandise) peut être multi-support, c’est à dire utiliser différents « modes de transport » pour être acheminé jusqu’aux synapses des lecteurs ? Imagine-t-il comme Peter Brantley des bibliothèques qui, plutôt que de conserver des livres sous leur forme « papier », conserveront des fichiers, et utiliseront l’impression à la demande pour fournir des exemplaires aux lecteurs ? Dans ce cas, la métaphore file juste, car le texte change de mode de transport dans la bibliothèque même.

Allusion à mon billet précédent : merci à Bruno Latour qui m’a offert un moment de perplexité, et à Wikipedia qui l’a fait déboucher sur un moment d’apprentissage.

Publié dans édition électronique, la vie numérique | Un commentaire